La manométrie





Dans cette section, nous présentons la théorie et le fonctionnement des manomètres. Pour mesurer la pression nous utilisons les manomètres à tube Bourdon, à membrane, à soufflet, différentiel et à capacité variable.
Nous traiterons également de l’effet des conditions de pression et de température sur le fonctionnement ainsi que les modes de défaillances. 






1. Principes généraux


Dans une centrale, l’un des paramètres les plus mesuré est la pression, notamment celle de la vapeur, de l’eau d’alimentation, du condensateur, de l’huile de lubrification. On appelle pression la mesure de la force  appliquée sur une surface, que l’on peut représenter comme suit :  


L’unité de mesure du Système international est le pascal, ou Pa, ses multiples, le kilopascal (kPa) et le mégapascal (MPa) sont fréquemment utilisés. L’unité de mesure anglo-saxonne est la livre par pouce carré, ou PSI (pounds per square inch). Un PSI vaut environ 7 000 Pa (7 kPa). 

2 Les échelles de pression




Quelques précisions sont nécessaires, avant d’aborder la détection et la  mesure de la pression. Puisque la mesure de la pression dépend de conditions environnementales, l’altitude et de la pression atmosphérique par exemple, il faut distinguer la pression relative et la pression absolue. La pression relative, ou pression manométrique, est la mesure la plus fréquente, p. ex. : la pression des pneus est donnée en pression relative. 
Ainsi, un manomètre indiquera une pression de zéro si on mesure la pression dans un contenant ouvert. Autrement dit, le manomètre mesure une pression par rapport à la pression de l’air. La pression manométrique est indiquée par « (m) » après l’unité de pression, par exemple : kPa (m).
On trouve parfois l’abréviation anglaise (g), pour gauge (jauge). Pour mesurer une la pression absolue il faut tenir compte de la contribution de la pression atmosphérique. On le dénote en écrivant « (a) »
après l’unité de pression, p. ex. : kPa (a). Donc, un manomètre absolu indiquera la pression atmosphérique — et non zéro — si l’on mesure la pression dans un contenant ouvert. 

 Pression absolue   =  pression relative + pression  atmosphérique
La figure 1 montre la relation entre pressions absolue et pression relative.
Notez que le point fondamental de l’échelle manomérique est 0 kPa (m),  soit 101,3 kPa (a), la pression atmosphérique normale.
Dans une centrale, on mesure surtout des pressions relatives. On mesure la pression absolue si la pression est inférieure à la pression atmosphérique, par ex. : le condensateur et l’enceinte de confinement sous vide.  

 Relation entre la pression absolue et la pression manométrique 



La détection de la pression a pour objectif l’affichage de la pression sur un cadran, la régulation d’une opération ou l’émission d’un signal électronique (4 – 20 mA) proportionnel à la pression mesurée.  

Le fonctionnement de la plupart des manomètres repose sur la transformation par un capteur — ou corps d’épreuve — de la pression appliquée en un mouvement physique qui lui est proportionnel dans leur  plage d’utilisation. Nous décrivons ci-dessous les principaux capteurs : le tube Boudon et les membranes, soufflets, capsules manométriques.
Nous employons souvent l’expression « pression différentielle ». Elle désigne la différence de pression entre deux quantités, deux systèmes ou deux dispositifs.  


Le tube Bourdon 
Les tubes (de) Bourdon sont des tubes courbes, dont la section est ovale (figure 2). Le fluide dont on veut mesurer la pression remplit l’intérieur du tube. La pression vers l’extérieur exercée par le fluide tend à arrondir la section du tube et à « dérouler » le tube dans la direction de la flèche. 
À cause de leur construction robuste, on utilise souvent les tubes Bourdon dans des environnements agressifs et les pressions élevées. On peut les utiliser aussi pour mesurer de très basses pressions. Les tubes Bourdon  réagissent toutefois plus lentement que les manomètres à soufflet ou à membrane.  

Soufflets
Ces manomètres sont dotés d’un cylindre, dont le fût est constitué d’un matériau souple, plié en accordéon (voir figure 3). Une des extrémités du cylindre est fixée à la « source » de pression et l’autre à un appareil indicateur ou un instrument. Les soufflets permettent une grande amplitude de mouvement (la course) dans la direction de la flèche une fois en contact avec le fluide dont on veut mesurer la pression. 
Manomètre à membrane
Ces manomètres comportent une membrane ronde ondulée dont la circonférence est fixée à une bride étanche (voir figure 4). D’un côté on trouve le fluide dont on veut mesurer la pression et de l’autre le fluide
indicateur. La pression dans l’enceinte cause une déformation dans le sens indiqué par la flèche. 

Les membranes donnent une lecture rapide et précise de la pression. Leur amplitude, ou course, est toutefois plus faible que celle des soufflets. 
Manomètres à capsule
Le terme manomètre à capsule s’applique à deux appareils différents. Le premier type est illustré à la figure 5. Le fluide pénètre dans la capsule qui, si elle n’est fixée qu’à l’orifice d’ouverture, se gonflera comme un ballon. Son fonctionnement ne diffère de celui du manomètre à membrane que par l’expansion des deux côtés. 
La capsule est formée de deux membranes courbes ondulées (habituellement d’acier inoxydable) dont le pourtour est hermétiquement joint. La pression exercée à l’intérieur de la capsule se traduit par un
mouvement dans la direction de la flèche.
Le deuxième type de capsule est analogue au transmetteur de pression différentielle, montré à la figure 7. La capsule du bas comporte deux membranes formant deux chambres de mesure externes et une chambre interne que l’on rempli d’une huile visqueuse. On applique une pression sur les deux côtés deux côtés de la cellule qui sera déformée en direction de la pression la plus basse. 
On place souvent au milieu de la cellule une membrane dont les ondulations répètent celles de ses cloisons afin de la protéger des surpressions. Les deux cavités internes sont remplies d’huile de silicone pour équilibrer la transmission de la pression.
La plupart des capsules de pression différentielles peuvent supporter sans dommage des pressions statiques se montant à 14 MPa (2000 psi) des deux côtés de la cellule. Elles ne sont cependant sensibles qu’à une gamme limitée de pression différentielle, habituellement de l’ordre que quelques centaines de kilopascals.
L’application de pressions différentielles dépassant la capacité de mesure de la capsule peut causer des dommages permanents.    

La plupart des transducteurs de pression utilisent une capsule de pression.Ils peuvent habituellement servir à mesurer des pressions différentielles (c’est à dire la différence de pression entre deux fluides). On les appelle donc transducteurs de pression différentielle ou encore cellule à pression différentielle. 

La figure 6 montre un transducteur de pression différentielle typique. Une capsule à pression différentielle est montée dans un boîtier. Un levier monté sur la capsule transmet le déplacement de la capsule à l’extérieur du boîtier. Un mécanisme placé au point où le levier traverse le boîtier lui sert de pivot tout en assurant l’étanchéité. Le boîtier est conçu pour qu’un côté de la capsule soit soumis à une pression élevée, et l’autre à une pression plus basse. Toute différence de pression provoquera une déformation de la capsule qui se traduira par un déplacement du levier. Le sommet du levier est connecté à un détecteur de position, lequel, via un système électronique produira un signal proportionnel au déplacement du levier et dont l’intensité se situe entre 4 et 20 mA. 
On pourrait utiliser ce transducteur de pression différentiel dans le montage montré à la figure 7. 
On utilise un transmetteur de pression différentielle pour mesurer la pression (manométrique) d’un gaz dans une enceinte. Dans ce cas, le côté basse pression du transmetteur est ouvert à l’air libre et le coté haute
pression est connecté à l’enceinte par un tuyau comportant une vanne. La vanne facilite l’enlèvement du transducteur.
Le signal du transducteur est proportionnel à la pression manométrique du gaz, Par exemple : 4 mA pour une pression de 20 kPa et 20 mA pour une pression de 30 kPa. 

On fixe un extensomètre à la surface d’un objet pour détecter la force qu’il subit. Un type d’extensomètre est constitué d’un fil fin de métal, attaché à la surface d’un dispositif que l’on veut surveiller. 


La résistance électrique d’un fil de métal s’accroît si on l’allonge ou si on réduit l’aire de sa section. 
Comme le montre la figure 8, un fil soumis à une force tend à s’allonger et sa section à se rétrécir. 
La résistance augmente proportionnellement à la force qui cause l’allongement et l’amincissement du fil. La jauge de déformation produit un changement de résistance que l’on peut mesurer dans le circuit d’entré
d’un amplificateur.
On peut coller un extensomètre à la surface d’une capsule de pression ou d’un levier dont la position dépend du corps d’épreuve. La figure 9 (page suivante) montre un extensomètre collé à un levier dans une cellule à
pression différentielle. Tout changement dans la pression mesurée produira une variation de la résistance de l’extensomètre qui sera « lue » par le circuit de compensation qui générera un signal entre 4 et 20 mA. 

Cellule à variation de capacité 
Tout comme la jauge extensométrique, les cellules à variation de capacité donnent des mesures basées sur des changements de propriétés électriques. Comme leur nom l’indique, ces cellules mesurent les changements de capacité électrique d’un condensateur. Un condensateur est un appareil qui accumule des charges électriques. il est constitué de plaques métalliques, les électrodes, séparées par un isolant électrique, ou substance diélectrique. Les deux électrodes sont branchées à un circuit électrique externe qui permet le passage des charges électriques de l’une à l’autre.
La capacité électrique est la mesure de la quantité de charge électrique que l’on peut stocker dans un condensateur. Elle est en proportion directe de la surface des électrodes et en proportion inverse de la distance qui les sépare. La capacité dépend également de la substance diélectrique 

(l’isolant) que l’on a placé entre les électrodes. Elle dépend également d’une propriété du matériau isolant placé entre elles : la permittivité ou constante diélectrique, laquelle est une mesure de l’accroissement de capacité électrique apportée par l’ajout d’un diélectrique entre les électrodes d’un condensateur. La permittivité est définie comme : 
où  :
C est la capacité, mesurée en farads, 
A est l’aire des plaques, 
d est la distance séparant entre les plaques, 
ε est la permittivité du matériel diélectrique.
On peut intégrer des condensateurs à des cellules à pression différentielle et exploiter leurs propriétés pour transformer les variations de pressions dans la cellule, en changement de capacité électrique. 

Les capteurs que nous présentons dans ce module sont largement  représentés dans l’instrumentation de contrôle et régulation des centrales nucléaires. Ils ne sont généralement pas visibles, car ils sont « enfouis »
dans les boîtiers des fabricants. Ces appareils sont très précis lorsqu’ils sont utilisés pour mesurer les quantités pour lesquels ils sont conçus dans la gamme de leurs spécifications. Ces contraintes ne sont pas limitées à la pression de fonctionnement, mais incluent la température, l’humidité et les vibrations.   


Les vibrations
Si l’effet le plus évident des vibrations est l’instabilité des mesures, les contraintes exercées sur les membranes fragiles et la tringlerie sont la conséquence la plus dangereuse car elles peuvent provoquer la défaillance du capteur. Il existe plusieurs sources de vibrations. 
Parmi les plus communes, on trouve les légères vibrations continuelles comme celles causées par une roue à ailette faussée d’une pompe, et les grandes vibrations comme celles causées par un marteau-piqueur. Les vibrations externes (ferrures lâches, montures mal fixées) peuvent avoir les mêmes effets.
La température 
 
La température a deux grands types d’effets sur la mesure de la pression. 
Le volume occupé par un gaz dépend de sa température. Certains systèmes compensent automatiquement la variation de pression due à la température. 
Un deuxième effet est plus insidieux. Utiliser un capteur à l’extérieur de la gamme de température nominale résultera en des lectures fortement erronées. À cause de la résistance et de l’élasticité de son tube, le manomètre Bourdon indiquera par rapport à la pression réelle, une mesure trop élevée à haute température et trop faible à basse température. Les autres types de capteurs subissent des effets analogues.  

L’humidité 
 
En règle générale, la composition des fluides des maîtrisée et connue. Nous mentionnons l’humidité ici, à cause des effets de la pureté d’une substance, gazeuse ou liquide, sur la mesure de la pression, notamment si l’appareil est utilisé comme manomètre à pression différentielle pour mesurer le débit d’un fluide.  Les masses volumiques dépassant la normale peuvent provoquer une lecture dynamique supérieure selon la position des capteurs et leur utilisation. En outre, la masse volumique de la vapeur ou de l’air ambiant peut affecter la mesure de pression statique et les mesures des cellules à pression différentielle. Habituellement, une valeur plus basse de la pression disponible pour la substance mesurée résultera en une lecture plus basse. Toutefois un manomètre à pression différentielle placé dans une salle chaude très humide indiquera des pressions trop élevées. 


Surpressions
Tous les manomètres que nous avons analysés ont été conçus pour fonctionner dans une gamme nominale de pression. Les systèmes d’exploitation des centrales prévoient recevoir des mesures très précises  des capteurs utilisés dans leur gamme. La détérioration des appareils par une surpression (pression dépassant la gamme nominale) pourrait conduirà des lectures faussées et une mauvaise régulation qui exposeraient la centrale à un danger. Le corps d’épreuve d’un capteur soumis à une surpression sera déformé au point de ne pouvoir reprendre sa forme originale, donc l’appareil donnera une indication supérieure à la valeur réelle.  

En général, les manomètres à membrane et à soufflet sont les jauges plus sensibles et les plus rapides. Ils sont toutefois celles les plus sujettes au bris en cas de surpression. Une petite rupture provoquera des lectures trop basses et une baisse de sensibilité aux changements de pression. En outre, la tringlerie et les mouvements à l’intérieur du capteur pourraient être tordus ce qui provoquerait un décalage permanent des mesures. Les tubes Bourdon sont très robustes et on peut les utiliser sous une forte pression.
Toutefois, ils seront déroulés si on les soumet à une surpression et donneront des lectures trop élevées. Ils se fractureront s’ils subissent des pressions extrêmes. 

Conduites de détection défectueuses
Des défectuosités dans les conduites de détections peuvent fausser les mesures et donner des informations inexactes sur la pression réelle. 
L’obstruction d’une conduite de détection altèrera la réponse dynamique du capteur qui réagira plus lentement à un changement de pression. Selon la gravité de l’obstruction, l’indication du capteur pourrait rester bloquée à une valeur fausse à basse pression, même si la pression de l’enceinte est
changée. 
Un manomètre au bout d’une conduite de détection percée ou fissurée donnera de façon caractéristique des valeurs trop basses. Parfois, on enregistra des chutes de pression suivies de lentes remontées. 

Coupure d’alimentation électrique 

Comme pour tout autre instrument fonctionnant avec du courrant alternatif, si l’alimentation d’un transducteur de pressions différentielles est interrompue, la sortie tombera à zéro ou sera erratique.